16 juin 2011
TRIPARTITE DU 28 MAI : LA BANDE DES TROIS
En principe, la mission d’une tripartite (Gouvernement, patronat, UGTA) est de proposer des solutions aux conflits de répartition inhérents à tout processus de développement économique et social et de faire avancer les réformes.
On était bien loin de ces considérations le 28 mai dernier : la priorité était de rendre grâce au chef de l’Etat. Le patronat, se réjouissait ‘’pour ses efforts en vue de dynamiser la croissance économique et promouvoir l’investissement’’.
Le Secrétaire Général du syndicat-maison, se félicitait des mesures qu’il aurait prises ‘’pour une amélioration continue du pouvoir d’achat, le développement social du pays et la relance de l’appareil économique’’.
Le chef du Gouvernement, lui, saluait, parce qu’il était ‘’l’initiateur’’ de la réunion, le grand architecte à qui revient tout le mérite.
D’emblée, la messe était dite : un patronat éclaté en de multitude de corporations non crédibles, un syndicat unique mais totalement désaffecté n’étaient là que pour cautionner une rencontre alibi, servir un faux débat pour éluder les vrais questions.
Pourtant, par ces temps de forte contestation sociale et d’instabilité politique récurrente l’on pouvait supputer l’ouverture de quelques dossiers sensibles, la prise de décisions capitales, des changements d’importance… Il n’en fut rien. Les questions clés ont été occultées. Pas un mot sur la promotion de l’offre de biens et services, sur l’amélioration de la productivité du travail, sur l’efficience de la formation, sur la maitrise des technologies nouvelles, sur la fuite des capitaux, sur l’exode des cerveaux, sur la répartition du revenu, sur la gouvernance…
Un silence sidéral.
Les attentes exposées par les chefs d’organisations patronales ont tourné le dos à la recherche d’une efficience dans la gestion. Elles portaient plutôt sur les prébendes : facilitations à l’importation d’intrants, allégement des procédures fiscales et des dettes fiscales, meilleur accès des PME au financement et allégement de son coût, soutien accru aux exportations hors hydrocarbures…
En somme les patrons veulent plus de rente.
L’administration les tenant en laisse, les clientélisant leur a octroyé des mesures subsidiaires pouvant relever d’autorités subalternes du ministère des Finances et surtout des promesses. Elle décide que le pilotage de ces mesures relève des banques et que le Trésor aura à prendre en charge les intérêts intercalaires en cas de rééchelonnement ou les bonifications d’intérêts.
Il est dit aussi que le recours à la remise documentaire est autorisé, qui le plafond des importations en urgence est relevé de 2 à 4 millions de DA.
Le gouvernement a aussi donné son accord pour la couverture des risques de change.
De fait la rencontre alibi s’est soldée par une opération de domestication.
Les actions ne sont accompagnées ni d’un dispositif opérationnel ni d’un calendrier d’application ni même d’un bilan d’actions similaires antérieures qui servirait de référence.
On a évité de mesurer leur impact financier, peut-être de peur d’annoncer un déficit budgétaire déjà catastrophique.
On a aussi omis de définir les recettes qui les couvriront. Décidément la planche à billets a de beaux jours devant elle.
Encore une fois, il s’agit d’octroi de privilèges, de redistribution de la rente dont le monde du travail est exclu.
D’ailleurs, le SG de l’UGTA a évacué toute revendication et compte ‘’différer les dossiers sociaux’’ ; les syndicats autonomes ne pouvant décemment pas partager cette option sont éliminés du conclave. Tout de même, promesse a été faite que ‘’les questions à caractère social’’ seront examinées en septembre. Elles attendront. Pour meubler le temps, la tripartite se propose de confier les dossiers à huit groupes de travail : environnement de l’entreprise, lutte contre la fraude, procédures fiscales, insertion des jeunes, dynamisation du secteur du bâtiment, mise à niveau des PME, encouragement aux exportations hors hydrocarbures, financement des PME.
Deux semaines après, la composition de ces groupes n’est toujours pas rendue publique ; encore moins les noms des responsables et leurs CV ! Les effets d’annonce suffisent!
Le chaos qui se profile hypothèque le destin de la nation ; sujet qui ne concerne pas un pouvoir prédateur se suffisant du quotidien.